Voyage exploratoire

Voyage exploratoire en Guinée en janvier 2012 par Émilie Lavigne

Dans la salle municipale, nous sommes rassemblés avec les délégués municipaux, les sages du village, hommes et femmes de Porédaka. Tout autour de nous, villageois et villageoises parés à la guinéenne. Les femmes portent fièrement leur voilure, tandis que les hommes, habillés en tunique et coiffés du chapeau traditionnel sont attentifs à ce que l’interprète traduit du français au poular.

Notre chef de mission, Monsieur Benoit Aubin, raconte la raison de notre visite et s’exprime avec brio, d’un ton posé, marquant des pauses pour que le traducteur puisse bien saisir le sens de ce qu’il dit.

Une image me vient en tête… j’imagine Jacques Cartier dans les années 1500, à la conquête de l’Amérique, accompagné d’un interprète qui échange avec les Amérindiens de l’époque. Mais nous sommes dans un tout autre continent… l’Afrique. Alors je ferme les yeux et je me laisse bercer par ce langage qui m’est inconnu. Je m’imagine à l’époque où marabouts, griots et sages du village représentaient des rôles sociaux importants dans chaque clan. J’entends presque les tamtams et les tambours annoncer la venue d’étrangers qui approchent le village.

Tout à coup, dans la salle, on entend une prière en poular pour rendre grâce à Dieu de l’intérêt que nous (Partage Québec Guinée) portons à cette petite collectivité. À plusieurs reprises, on entend, dans un murmure, une réponse donnée en choeur. Soudain, j’ouvre les yeux… Ce n’est pas un rêve. Ça y est, me voilà bien en Afrique!

Je ferme de nouveau les yeux et tout à coup… une, deux, trois sonneries de téléphone cellulaire brisent soudainement ma rêverie. Je suis bien en Guinée, en janvier 2012. Et je me demande comment ce pays peut vivre si bien, un pied dans la modernité et un autre dans le passé lointain… l’électricité qu’on ne retrouve qu’à Conakry, et ce, à temps partiel, d’énormes écrans de télévision plasma qu’on entrevoit à travers des maisons de carton, des femmes qui nettoient les vêtements avec leur planche à laver, vont chercher l’eau au puits et qui préparent la cuisine à l’extérieur sur le feu qui cuit lentement. Je suis éblouie et étonnée devant ce paradoxe.

«Et je vois des sourires fuser de toutes parts qui signifient que bien que certains envient notre modernité occidentale, ils réussissent à être heureux, semblant vouloir dire d’un ton moqueur, les Occidentaux ont l’heure et la montre, mais nous, nous avons le temps…»